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IRIS :

Il aime que je lui raconte l’histoire des dahlias et des pivoines. Votre père a toujours été un homme d’action, mais il oublie tout.

Alors moi, je lui raconte, je lui rappelle de quoi nos vies sont faites. Et il rit, quand il entend l’histoire des dahlias et des pivoines.

Il me dit : dis-moi ce que disait ma mère, et puis il m’embrasse. Et avant une nuit d’amour, il aime que je lui raconte une nuit d’amour passée, ça le met en état. Il me regarde avec des yeux brillants, le récit de nos ébats semble toujours l’étonner, et j’entends son cœur battre plus fort. Mais après l’amour, après l’amour il a toujours une lueur de tristesse dans le regard.

Alors je lui raconte l’histoire des dahlias et des pivoines, ou celle de notre nuit d’amour, et il rit à nouveau.

Votre père ne parle pas beaucoup mais il écoute beaucoup. Il est comme ça, il prend, et moi je donne, je donne.

Mais parfois c’est trop. Tout à coup il se lève et il prend une tasse et il la jette contre un mur où elle explose avec beaucoup de fracas. Alors je me tais. Et lui, il me regarde, l’air apaisé, et il me dit : eh bien, pourquoi tu t’arrêtes, parle encore. Et il me dit ça

avec les yeux les plus doux du monde, des yeux d’enfants, comme un enfant qui regarde sa maman lui apporter un gros gâteau d’anniversaire, et qui voit la silhouette de sa mère approcher de loin, dans la cuisine, à travers l’encadrement de la porte, et il voit

le bassin de sa mère se balancer alors qu’elle marche lentement en chantant happy birthday to you d’une voix un peu trop lente,

et sa marche est toute aussi lente, et sa silhouette vacille derrière la lumière des bougies, et elle regarde son fils avec tant

d’amour, et son fils lui rend cet amour.

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